sexta-feira, 19 de novembro de 2010

Silvio Berlusconi restitue son pénis à Mars et ses mains à Vénus

Silvio Berlusconi restitue son pénis à Mars et ses mains à Vénus

LEMONDE pour Le Monde.fr | 19.11.10 | 15h52  •  Mis à jour le 19.11.10 | 17h38
 

 
Les statues de Mars et Vénus sculptées au IIe siècle après Jésus-Christ, que Silvio Berlusconi a faites restaurer.

Les statues de Mars et Vénus sculptées au IIe siècle après Jésus-Christ, que Silvio Berlusconi a faites restaurer.REUTERS/STRINGER/ITALY
Rome, correspondant - Presqu'intactes, imposantes (2,28 mètres de haut), lisses et lourdes de leur poids de marbre blanc (1,4 tonne), Mars et Vénus n'avaient qu'un défaut : ces deux statues sculptées au IIe siècle après Jésus-Christ – représentées sous les traits de l'empereur Marc-Aurèle et de son épouse Faustine – avaient laissé dans la terre d'Ostie où elles ont été retrouvées en 1918, son pénis pour l'une, ses deux mains pour l'autre. Trois fois rien en comparaison de celles, autrement mutilées, qui remplissent les réserves et les musées italiens.


Trois fois rien, c'est encore deux fois trop pour Silvio Berlusconi qui, depuis quelques mois, héberge – à titre provisoire – le couple impérial dans la cour d'honneur de la présidence du conseil, le palais Chigi à Rome. Aussi soucieux de sa propre image que de son décor, le premier ministre a décidé d'appliquer à ses statues la chirurgie esthétique qu'il ne se refuse pas. Convoquant son architecte personnel, il lui a confié la tâche de rendre à Vénus ses dix doigts, à Mars, sa virilité. Ce qui fût fait. Coût de l'opération, sans points de suture apparents : 70 000 euros, payés par la présidence du conseil.
Révélée jeudi 18 novembre par Carlo-Alberto Bucci, journaliste du quotidien de gauche La Repubblica, l'affaire fait grand bruit. Outre la somme dépensée qui aurait pu être utilisée pour sauver un pan de mur à Pompeï ou une fresque à L'Aquila, M. Berlusconi et son architecte se voient reprocher d'avoir voulu confondre le vrai du marbre et le faux de la résine, gommant le hiatus entre les éléments originaux les parties reconstituées. Le ministère de la culture et son titulaire Sandro Bondi sont également sous accusation pour avoir autorisé cette radicale remise à neuf.

"L'ART EST UN POINT DE VUE"
" Encore une fois, a regretté la députée du Parti démocrate (gauche) Manuella Ghizzoni, nous sommes en présence d'une institution qui se plie aux caprices et aux manies du premier ministre imposées cette fois à deux vestiges de l'Antiquité qui, contrairement à d'autres, ne se sont jamais lamentés du passage du temps." En réponse, le ministre a fait savoir que ces "retouches" ne contrevenaient pas à l'article 7 de la charte de l'Unesco de 1972 adoptée par l'Italie en matière de restauration et qu'elles étaient "innovantes". Ces prothèses devraient normalement être ôtées lorsque les statues retrouveront leur domicile habituel du musée romain des thermes de Dioclétien.
"C'est une question idéologique, souligne l'expert et marchand d'art italien Peter Glidewell. Le Bernin lui même a 'arrangé' quelques antiquités. Viollet-le-Duc qui passe aujourd'hui pour un sagouin était considéré comme un génie à son époque. L'art n'est pas une science, mais un point de vue. Le seul critère de jugement est celui du bon goût."
Mais que Silvio Berlusconi impliqué dans plusieurs scandales sexuels restitue le membre perdu de Mars fera ricaner les psychanalystes. En 2008, il avait, au contraire, fait recouvrir pudiquement le sein généreux d'une copie d'un tableau de Tiepolo, La Vérité dévoilée par le temps, qui orne les murs de la salle de presse du palais Chigi. Réparateur aujourd'hui, dissimulateur hier, quel est le vrai Berlusconi ?
Philippe Ridet

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