Portugal : «Les politiques sont irresponsables»
INTERVIEW - Lisbonne aggrave la crise de la dette européenne en refusant toute aide financière d'urgence. João Sousa Andrade, professeur d'économie à l'Université de Coimbra, décrypte les enjeux de pouvoir derrière le blocage politique actuel.
Lefigaro.fr - Pourquoi le Portugal refuse-t-il toute aide européenne et se trouve dans l'impasse?João Sousa Andrade - Cette crise purement politique montre toute l'irresponsabilité des hommes politiques portugais. Bien qu'il soit d'accord sur le fond, le parti social-démocrate, dans l'opposition, a refusé mercredi soir le plan de rigueur proposé par le gouvernement socialiste. Sans qu'il y soit obligé, ce dernier s'était présenté devant le Parlement en sachant qu'il était en minorité et qu'il devrait donc démissionner.
Les deux partis ont consciemment provoqué un blocage. Ils ont dans l'idée de provoquer des élections anticipées d'ici fin mai parce qu'ils pensent tous les deux les gagner. Et ils veulent aller devant les électeurs en leur disant que la responsabilité de la crise actuelle appartient à l'autre…
Le Portugal peut-il tenir sans l'aide européenne?
L'État doit trouver 4,5 milliards d'euros en avril puis 5 milliards en juin pour financer la dette. En temps normal, cela ne pose pas de problème. Mais à cause de la crise de confiance, les taux d'intérêt ont atteint des records, à plus de 8% pour des emprunts à 5 ans. Insoutenable pour les finances publiques. Pour éviter d'emprunter auprès des investisseurs à ces taux exorbitants, le gouvernement envisage de demander des prêts directement aux banques.
Ce n'est toutefois qu'une solution de court terme. Le Portugal doit trouver 39 milliards d'euros cette année, dont 32 milliards pour financer la dette. C'est énorme! Avec une inflation de 2% et une croissance probablement nulle en 2010, le pays ne peut pas s'en sortir.
Comment voyez-vous l'avenir?
D'après moi, Lisbonne fera appel à l'aide conjointe de l'Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI) d'ici les prochaines semaines. Nous avons déjà eu affaire avec le FMI par le passé, en 1977 et en 1983. À l'époque, nous n'avions pas respecté les critères de l'institution internationale mais les objectifs avaient tout de même été atteints grâce à la reprise de l'économie mondiale.
Aujourd'hui, je ne crois pas que notre gouvernement, quel qu'il soit, ne veuille vraiment réduire les dépenses de l'État. Et ce, même si le système éducatif a été rationalisé et que l'âge de départ à la retraite sera repoussé à 65 ans d'ici 2013. Comme il y a 30 ans, nous ne nous en sortirons que si l'économie internationale repart.
Sem comentários:
Enviar um comentário