Les sociaux-démocrates suédois reviennent aux fondamentaux de l’Etat-providence
LEMONDE.FR | 27.03.11 | 20h44 • Mis à jour le 27.03.11 | 21h22
Dans un pays comme la Suède, l'arrivée d'un nouveau dirigeant à la tête du Parti social-démocrate est ce qui se rapproche le plus de l'élection du pape. Quelque 500 journalistes ont suivi du vendredi 25 au dimanche 27 mars après-midi le congrès extraordinaire du Parti social-démocrate à Stockholm, qui avait pour principal objectif d'entériner le choix de Håkan Juholt. C'est beaucoup pour un parti d'opposition, et la couverture médiatique est quatre à cinq fois plus importante que pour les conservateurs, par exemple, parti du premier ministre, Fredrik Reinfeldt.
Comme pour l'élection du pape, le choix de Håkan Juholt s'est fait dans le plus grand secret, sur fond de spéculations, avec, dans un premier temps, de nombreux autres candidats dont les noms ont été jetés en pâture au public puis éliminés les uns après les autres. De ce point de vue, Håkan Juholt est typiquement un candidat de compromis, celui que personne n'attendait, quasi inconnu, et qui pourtant, dès les premiers mots prononcés, a conquis le parti, tant celui-ci est dans l'attente.
PRÉDOMINANCE DE L'IDÉOLOGIE SOCIALE-DÉMOCRATE
Les sociaux-démocrates ont essuyé deux défaites consécutives, en 2006 et 2010. Rien d'anormal en soi dans une démocratie bien établie comme la Suède, si ce n'est que le Parti social-démocrate est un parti qui avait été au pouvoir de façon quasi ininterrompue depuis les années 1930 et pour qui l'exercice du pouvoir a souvent été vu comme une évidence. La domination du parti est telle que tous les autres partis, y compris à droite, sont imprégnés d'idéologie sociale-démocrate. Le gouvernement de centre-droit en place l'a tellement bien compris qu'il a remporté les élections de 2006 en transformant radicalement la rhétorique du parti conservateur pour en faire le "nouveau parti des travailleurs", nouveau converti au modèle suédois.
L'ex-présidente du Parti social-démocrate, Mona Sahlin, une femme qui a fait carrière dans le grand Stockholm, avait opéré un virage vers la droite, voulant privilégier les petites entreprises. A l'inverse, Håkan Juholt est un homme de la province qui se targue de ne pas être dans les petits papiers des apparatchiks de la capitale. Et il a clairement annoncé un virage à gauche. Certains lui reprochent déjà de ne pas avoir encore présenté de ligne claire de lutte contre le chômage. Mais il était plus important pour Håkan Juholt de s'attaquer d'abord à recoller les morceaux d'un parti fragilisé. Lors de son discours d'investiture, samedi, il s'est livré à un véritable inventaire à la Prévert des fondamentaux de la social-démocratie nordique. Pour l'économie de marché, mais contre le capitalisme.
REVIGORER L'ÉTAT-PROVIDENCE
Beaucoup d'observateurs constataient que cela faisait au moins vingt-cinq ans qu'ils n'avaient pas entendu parler ainsi de l'Etat-providence. Le nouveau dirigeant social-démocrate a dit son amour du bien commun, critiquant de nombreuses privatisations passées, glorifiant le secteur public, fustigeant une économie où les femmes sont sous-payées et où de plus en plus d'enfants vivent dans la pauvreté.
Les réponses aux multiples défis viendront plus tard. Mais Håkan Juholt a rempli sa première mission: redonner l'envie de se battre à un parti qui se cherchait ces dernières années.
Sem comentários:
Enviar um comentário