Faut-il s’aimer soi-même ?
Notre époque a son évangile qui se formule ainsi : « Aime-toi toi-même et le reste te sera donné de surcroît. » Aux esprits critiques qui pointent le venin égoïste d’une telle proposition, il est répliqué que nul ne peut aimer autrui s’il n’est d’abord porté par un solide amour de soi. Mais, comme le remarquait Rousseau, la sympathie innocente à son propre égard a vite fait de tourner à l’orgueil mortifère. D’où l’intérêt d’éclairer les différents visages de l’amour de soi. L’auto-adoration, d’abord, qui pousse Narcisse à se noyer dans son propre reflet et incite certains à s’abîmer devant leur profil Facebook. Le pari pragmatique d’une estime de soi, ensuite, qu’illustrent les meilleures séries made in USA. Plus martiale est l’option consistant à se sculpter patiemment : expérimentée par les stoïciens, actualisée par Foucault comme mode de résistance au pouvoir et reprise aujourd’hui par le coaching. À moins que, enfin, nous ne nous tournions vers les sagesses orientales qui nous invitent à prendre le problème par l’autre bout : s’aimer juste assez pour, à la fin, s’oublier.
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