Angela Merkel, croquemitaine de l'Europe
POLITIQUE – Comparée à Bismarck ou Hitler, la chancelière cristallise l'antigermanisme primaire ravivé par la crise de la dette.Jean-Michel NormandLa charge, menée sabre au clair, d'Arnaud Montebourg contre " la politique à la Bismarck d'Angela Merkel " et celle de Jean-Marie Le Guen, comparant Nicolas Sarkozy à Edouard Daladier cédant devant Hitler, semblent bien innocentes au regard de ce que subit la chancelière allemande ailleurs en Europe. Généralement représentée avec un casque à pointe, lorsque ce n'est pas un uniforme de la Wehrmacht, la chancelière concentre sur elle tout le ressentiment que déclenche le leadership de plus en plus marqué qu'exerce son pays sur les affaires européennes. La palme de l'antigermanisme primaire revient sans doute à la Grèce, où les manifestants brandissent régulièrement des photomontages mettant en scène une Angela Merkel membre de la Waffen-SS. A Athènes, les journaux grecs, qui n'ont toujours pas digéré la couverture du magazine allemand Focus de mars 2010 (on y voyait une Vénus de Milo adressant un doigt d'honneur à l'Europe), réclament de nouveaux " dommages de guerre " à la chancelière. Lors d'un show télévisé, le présentateur a souhaité, sur fond de musique militaire, un " joyeux Noël allemand " aux téléspectateurs. Quant aux caricaturistes de la presse britannique, ils se déchaînent. Ces dernières semaines, le célèbre Peter Brookes, du Times, a présenté la chancelière fouet en main, vêtue d'un uniforme prussien, et Steve Bell, du Guardian, en lascive Salomé recevant la tête de Nicolas Sarkozy sur un plateau et en Domina portant un collier clouté. " Bienvenue dans le IVe Reich ! ", a lancé de son côté le Daily Mail, estimant que " là où Hitler avait échoué à conquérir l'Europe par la voie militaire, les Allemands modernes prennent la relève à l'aide du commerce et de la discipline financière ". En Italie, les sarcasmes sont plus souvent réservés au président français qu'à Angela Merkel. Le quotidien Libero, proche de la très à droite Ligue lombarde, l'a néanmoins croquée portant une petite moustache. L'Espagne semble moins sujette au prurit anti-allemand. Le quotidienABC s'inquiète malgré tout d'une " germanisation de l'Europe ".
Outre-Rhin, ces signes de crispation inquiètent beaucoupFocus. Le magazine discerne clairement une " haine hystérique de l'Allemagne ". Les autres médias semblent prendre les choses avec davantage de recul et de philosophie, comme s'ils étaient rompus à ce genre de réactions. Le Berliner Zeitungtrouve des circonstances atténuantes aux anti-Merkel. Il constate que " sous l'égide de l'Allemagne, on impose aux pays du sud de l'eurozone, comme s'ils n'avaient pas d'autre alternative, une politique d'austérité conçue à Berlin et mise en oeuvre par de prétendus gouvernements d'experts ". Certains médias prennent les choses avec humour. Cité par le site Internet d'Arte, le Spiegel constate que -" l'Allemagne a gagné la seconde guerre mondiale la semaine dernière ". " Oups ! j'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas ? ", s'interroge l'éditorialiste.
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